Occupé dès l’époque gallo-romaine, le Mas d’Agenais a plus de 2.000 ans d’histoire. Avec un beau fleuron récupéré de la période, qui ornait une riche villa romaine : une statue en marbre, dite « La Vénus du Mas », du 1er siècle avant J.C, déposée au Musée des Beaux-Arts d’Agen, le village disposant d’une belle copie, qu’on peut voir dans l’Espace Rembrandt.
Bâti au sommet d’une terrasse calcaire, Le Mas d’Agenais domine Dame Garonne et son canal, propice aux balades à pied, à vélo, en bateau.
Avec une écluse et une halte nautique, ce canal accueille les plaisanciers dans d’excellentes conditions, un gîte navigant, de belles opportunités de croisière.
Outre le tableau de Rembrandt, abrité dans la Collégiale (XI et XIIèmes siècles), une église superbement rénovée, et riche en décor sculpté roman, le village compte quelques autres trésors :
- la Halle au Blé (début XVIIème siècle), environnée de deux restaurants, de plusieurs autres commerces, et de chambres d’hôtes
- la Halle au Chanvre (1845)
- le lavoir à cinq pans, restauré au XIXème siècle, et sa fontaine Galiane
- une porte romane, la seule qui subsiste des cinq hautes portes ouvertes dans le mur d’enceinte en briques, encore apparent, qui protégeait la population et un petit château seigneurial, détruit au XVIIème siècle
- une forêt communale de 1.000 ha (la plus grande forêt de feuillus d’Aquitaine), fort appréciée des randonneurs, des chasseurs de palombes et des amateurs de champignons
- et pour passer d’une rive à l’autre de la Garonne, un pont suspendu à l’étonnante architecture (1840). »
Flâner à travers l'histoire du MasLe Massédaire
2022, année glorieuse pour le Mas d’Agenais et ses habitants. Une année que la grande histoire retiendra. Elle verra en effet la réouverture de sa collégiale, transfigurée par une magnifique restauration, et ainsi prête à accueillir son joyau, notre Crucifixion, peinte par Rembrandt.
Pour accompagner ces événements, quoi de mieux et de plus utile qu’une petite histoire du Mas, revue et corrigée, de manière à ne pas paraphraser ce qu’ont fait les grands anciens, MM. Joret et Vacqué par exemple. Habitant et amoureux du Mas depuis pas mal d’années, j’ai décidé de m’atteler à la tâche. Et pour soutenir l’attention du lecteur, il m’a paru pertinent, pour décrire le Mas à travers le temps et sous toutes ses facettes, d’éviter d’écrire une histoire linéaire et de le faire sous forme d’un abécédaire.
Mon ambition, instruire et divertir le lecteur. Et à l’occasion, grâce à des recherches qui m’ont permis de découvrir des faits et des documents oubliés, de tâcher d’éclaircir quelques mystères historiques. C’est ainsi que je vous propose le « Grand abécédaire du Mas », ou « Massédaire », qui va vous accompagner durant quelques semaines.
Dernière précision : je revendique le côté totalement subjectif du Massédaire.
A, comme...
Accent
Notion difficile à appréhender, qui m’a incité à me plonger dans Littré, l’ami incomparable, qui définit la chose ainsi : « Inflexion particulière à une nation, aux habitants de certaines provinces. Exemple, accent gascon ». Cette définition, assez sèche, ne rend pas justice aux différents accents qui mettent du piment dans le français « national », lui donnent du charme et l’enrichissent. L’accent gascon vient évidemment de la manière de parler du patois gascon, et en est en quelque sorte la butte témoin dans le français de tous les jours. Donne de la couleur à un français devenu trop rapide, sans accent tonique et mal articulé. L’accent gascon utilise chaque lettre et les met en valeur. Il est plus rugueux, un peu comme un match de rugby.
Alsace
On peut être surpris de rencontrer au Mas, au hasard des rues, une place d’Alsace, une rue de Biesheim, une rue des frères Boellinger, tous noms bien étrangers à la Gascogne.
En 1939, juste après la déclaration de guerre de la France à l’Allemagne, le gouvernement français décide de faire évacuer un certain nombre de localités proches de la frontière allemande, c’est-à-dire en l’occurrence du Rhin. Parmi ces localités se trouvait le village de Biesheim, très proche de Neuf Brisach en France et de Vieux Brisach, de l’autre côté du fleuve. Il est donc ordonné aux habitants de quitter leur village, et beaucoup de ces frontaliers de l’est partent vers le sud-ouest de la France, pour se retrouver le plus loin possible des envahisseurs. Exode face à l’annexion possible, souvenirs douloureux de 14-18. Près d’un millier d’habitants de Biesheim se retrouvent alors, en septembre 1939, au Mas, qui a dû s’organiser en urgence pour les héberger. Après l’armistice, en septembre 1940, l’espoir de retrouver une vie normale dans leurs foyers l’emporte et beaucoup d’entre eux repartent pour leur village, mais en octobre 1940 intervient l’annexion par le Reich de l’Alsace et de la Moselle, qui fait revenir plusieurs familles au Mas, où elles passeront la guerre.
Ces événements dramatiques avaient créé des liens étroits entre les deux villages, et pour éviter que le temps et l’oubli ne les fassent disparaître, les maires des deux villes ont décidé en 1969 de les jumeler, manière de resserrer les liens grâce aux cérémonies et aux voyages réguliers des uns vers les autres.
C’est pourquoi on retrouve dans la ville un saumon d’argent (blason de Biesheim) accompagnant nos 3 mains de justice.
Artisans (et commerçants) disparus
Il faut imaginer la rue de Biesheim, qui n’est qu’une partie de la Grand Rue, et regarder les cartes postales en noir et blanc collectionnées par certains (voir le montage de JY Vincent et P. Parage). On peut aussi examiner les façades des bâtiments de chaque côté de cette rue. On constate facilement que chacun d’entre eux abritait qui une échoppe, qui une boutique, qui un café. Lors des jours de foire la rue était noire de monde... Aujourd’hui plus rien, le dernier commerce, celui de la famille Lespine, a fermé il y a déjà deux ans (en 1960, il figure bien sûr dans mon annuaire « Lespine, fruits et primeurs »).
J’ai sous la main l’Annuaire du département de Lot-&-Garonne, édition de 1960 (170ème année !), « Télé-annuaire du département, administratif, commercial, industriel, agricole, et liste des abonnés au téléphone ». En parcourant cet annuaire, on découvre qu’il y a au Mas, à cette époque pas si lointaine, outre les métiers et professions « classiques », c’est-à-dire épiciers, bouchers, assureurs, garagistes, etc., un afficheur, un bijoutier, un charron, un ferblantier, un greffier-huissier, des peintres en bâtiments et en « voiture », des sabotiers, un tonnelier, et même, ô combien charmant, une « marchande de nouveautés », petit « Au Bonheur des dames » rural.
Aujourd’hui, autour de la halle au blé, nous avons un boucher, deux restaurants et une coiffeuse, qui font tous vivre le cœur commercial du village. Et ce n’est que le début de la renaissance...
Association
Les associations sont les piliers de la vie sociale d’un village. Une fois de plus, à lire les grands anciens, il y en avait beaucoup plus au début du XXème siècle. Et d’ailleurs, à consulter l’Annuaire de 1960 que je cite plus haut, il y avait encore à cette date des associations qui ont disparu depuis. Bien sûr il reste les associations bien installées, historiques, même, comme les Amis du Mugat, l’Amicale laïque, le rugby, les Pompons bleus, etc., et n’oublions pas la plus récente qui n’est pas la moins vaillante, l’association « Rembrandt au Mas ! », de création assez récente, née du souhait de magnifier l’événement que représente le retour du tableau en 2022.
Cet annuaire de 1960 fait état, entre autres, de l’existence d’une association dont le nom « Société le Réveil », et les buts indiqués « tir, gymnastique, préparation militaire », en font une relique émouvante héritière de l’après-guerre. Je veux dire, bien sûr, l’après-guerre de 1870, guerre désastreuse éclipsée par d’autres encore plus dévastatrices, et dont on a oublié le traumatisme qu’elle créa dans l’esprit des Français, qui vivaient encore dans le souvenir magnifié de l’Empire et voyaient leur pays comme une puissance majeure. Le Réveil rappelle l’esprit de la Revanche né dans le sillage de cette guerre. Sous couvert de gymnastique, il s’agissait de préparer les esprits et les corps à la guerre à venir contre l’Allemagne. En tous ses membres sont partis pour le front, et comme beaucoup d’entre eux figurent sur les Monuments aux morts, elle fut mise en sommeil. Elle fut ranimée en 1930, mais pour pratiquer le basket.... on était quand même loin de l’idée d’origine …
Lire la totalité du Massédaire